Famille d'accueil: un bénévolat pas comme les autres

Rencontre avec Xavier Verstappen, directeur de l’ASBL L’accueil familial 

par

© Alexandre Demacq

Rencontre avec Xavier Verstappen, directeur de l’ASBL L’accueil familial 

© Alexandre Demacq

Décider de devenir famille d’accueil, ça change la vie. Celle des familles, évidemment, mais aussi celle de l’enfant qui sera accueilli pour qu’il puisse recevoir l’amour que chaque enfant mérite. Nous en avons parlé avec Xavier Verstappen, directeur de l’ASBL « L’accueil familial » qui regroupe un ensemble de projets avec des familles d’accueil au sein de la Communauté française. 

Xavier Verstappen
Xavier Verstappen, directeur de l’asbl L’accueil familial

Mammouth: Quelles sont les modalités de l’accueil par une famille en Fédération Wallonie-Bruxelles aujourd’hui ? 

Xavier Verstappen: Il y a trois catégories. Pour l’accueil d’urgence, la règle c’est : quinze jours renouvelables deux fois au maximum, donc 45 jours. Le court terme, ce sont des accueils de trois mois renouvelables deux fois également. Enfin, le moyen long terme où les enfants grandissent dans leur famille d’accueil qui devient un peu leur seconde famille.  

Peut-on comparer une adoption et un accueil long terme ? 

La grande différence, c’est qu’être famille d’accueil, c’est permettre aux enfants de vivre une double appartenance, c’est-à-dire garder un lien avec leurs parents et à la fois vivre en famille d’accueil.  Nous travaillons avec chaque enfant et ses parents au maintien du lien et au développement du « juste lien ». Parfois ça signifie l’absence de lien, parfois des rencontres familiales ponctuelles que l’on peut organiser dans nos salles de rencontre.   

Vous manquez de familles d’accueil… 

C’est toujours le problème. Le nombre de familles d’accueil sélectionnées, dans le cas où il n’y a pas de liens de sang, n’a cessé d’augmenter. Pourtant, le manque est cruel, à Bruxelles, il y a plus de 70 enfants qui sont en attente, et sur l’ensemble de la Communauté française, on est autour de 300 enfants qui attendent un accueil long terme. On parle souvent de 600 enfants en attente d’une famille d’accueil, c’est parce qu’on a aussi des demandes d’urgence et de court terme.  

Au niveau du profil des parents qui viennent se présenter de manière volontaire, qu’est ce qui revient généralement ? 

C’est quand même une valeur sans doute très occidentale et socio-économiquement moyenne ou forte que de se dire que je vais être solidaire d’un enfant qui n’est pas le mien. Cela dit, on cherche, pour l’instant, à Bruxelles, à pouvoir s’ouvrir à d’autres cultures de manière plus concrète et plus importante. Homme, femme,  marié ou pas, avec ou sans enfant, homo ou hétéro, toutes les configurations reconnues par l’adoption sont aussi valables pour l’accueil évidemment. 

L’équipe de l’asbl L’accueil familial

Comment gérer ce bénévolat 24 heures sur 24, sept jours sur sept ? 

Ça change une vie. C’est comme quand on décide de partir en Amérique, ça change une vie aussi. Ça transforme l’organisation familiale. D’ailleurs, quand il y a des enfants, ils sont inclus dans le processus de réflexion autour du projet. 

Combien de temps dure ce processus ? 

Ce processus dure minimum six mois pour le moyen-long terme. Pour le court terme et l’urgence, c’est un peu plus court. Ce qui est vraiment important, c’est de se dire que l’accueil d’un enfant, ce n’est pas du shopping où on met n’importe quel enfant dans n’importe quelle famille. Il faut parfois attendre quelques semaines ou quelques mois, malgré la longue liste d’attente d’enfant, pour trouver le bon profil d’enfant qui va bien correspondre à la famille qui est disponible. 

On a parlé des enfants et des familles. Quel suivi est-ce que vous, en tant qu’ASBL, vous proposez à ces familles ? 

On n’est pas présent au quotidien, ça, c’est vraiment quelque chose qu’il faut comprendre. Nous sommes, comme intervenant social, toujours pris entre des intérêts très différents. Celui des parents, celui de la famille d’accueil et l’intérêt de l’enfant qui est au milieu. Un parent d’accueil ne devient pas le parent de naissance. C’est parfois difficile à comprendre, mais pour le bien de l’enfant, chacun doit rester à se place et faire son rôle pas plus, pas moins.

Est-ce que cela coûte, d’être famille d’accueil ?

C’est surtout un coût en termes de temps. Le coût financier est réel pour la famille d’accueil, mais n’est pas un obstacle grâce au soutien de la Communauté française (14 à 15 euros par jour). Cependant, quand on a organisé sa vie, sa tarte de temps comme je le dis toujours, avec nos différentes occupations, tout est bien rempli et on n’a pas envie de toucher à grand-chose. Devenir famille d’accueil, c’est toucher à ça.

Comment gérer la fin d’un accueil d’urgence? 

Il nous faut des personnes quand même assez fortes, assez disponibles et qui sont au claires sur leurs motivations. Si tout ça est acquis, alors on va pouvoir, à la fin de l’accueil, confier à d’autres l’enfant pour qui on a pris soin pendant un temps. Si l’enfant n’est pas trop abimé par ce qu’il a vécu avec ses parents, l’enfant va ressentir ça et va pouvoir vivre cette transition le mieux possible. Mais, bien sûr, on n’est pas tous faits pour faire n’importe quel type d’accueil.

Est-il possible de revoir un enfant qu’on a accueilli après son départ ? 

Oui, mais à condition que ce soit fait progressivement et au bon moment. Il ne faut pas être dans une concurrence au moment du passage d’une famille d’accueil d’urgence à une famille d’accueil de long terme. Mais sinon, pouvoir, en tant que famille long terme, aider l’enfant à comprendre et à intégrer son histoire avec toutes les ruptures, mais aussi avec toutes les bonnes personnes qu’il a pu rencontrer, c’est une bonne chose.  

Mais ce n’est pas une garantie … 

Ça se met parfois, et c’est bien. Parfois, ça se met mal et c’est compliqué, mais c’est comme ça. Dans l’intérêt de l’enfant, il faut toujours donner priorité au projet long terme. 

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